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Tout d’abord, je me suis dit : « Quel étrange objet-abri ! ». En fait, il est plus petit que je ne le pensais. Je me positionne face à la vitre et là, tout de suite, le vide m’attire. Mes genoux tremblent ; instinctivement, je recule d’un pas. J’inspire, j’expire, je prends en compte ces nouveaux repères.

Ça y est, la veille commence. Je scrute d’abord l’horizon et le ciel parsemé de nuages blancs, gris et roses. On dirait un tableau qui change sous le pinceau d’un peintre invisible. Un oiseau passe juste devant moi, comme pour me souhaiter un bon moment et me saluer. J’ose enfin regarder vers le bas, en direction du parking.

Je vois quelques passants pressés, emmitouflés dans leurs manteaux. Je me dis alors qu’il n’y a pas grand monde. Au même moment, un chien aboie très fort, mais je ne le vois pas, comme pour me rappeler que la vie est là, partout, tout le temps. Je m’attarde alors sur les détails du paysage : les bannières secouées par le vent, les cheminées qui fument — signe que l’hiver est arrivé en avance. Le temps défile, les lampadaires s’allument déjà, signe que ma veille touche à sa fin.

Je lève les yeux vers le ciel et une nuée d’une centaine d’oiseaux passe au-dessus de moi en ondulant. C’est comme s’ils exécutaient un ballet devant moi. J’en reste bouche bée. Je souris.

Il est déjà temps de quitter l’objet-abri.

Arrivée à l’aube, alors que les premières lueurs du jour apparaissent déjà, me voilà face à toi, Beauvais ! Une heure face à face avec le soleil qui se lève à nos côtés. Profiter, savourer une heure offerte pour observer le spectacle du matin !
C’est si rare, du temps pour ne rien faire, surtout à cette heure.

Du haut de ce promontoire, la première chose qui attire mon attention est cette fumée qui surgit de la cheminée d’une usine au loin.

Se repérer, s’orienter. Je suis plein Est… non, plutôt Nord-Est.
Joli petit soleil, te voilà ! Un petit demi-cercle orange apparaît et monte, s’agrandit petit à petit.
Compter les clochers, repérer les quartiers de la ville. Un, deux, trois… et Saint-Étienne, qui est juste là, juste à côté, en train de veiller aussi.

Le soleil éclaire petit à petit l’église du quartier où je vis. Je pense à comment et pourquoi je suis arrivée dans cette ville il y a plus de vingt ans, et je réalise que j’aperçois le premier immeuble où j’ai habité. Je songe à la première fois où j’ai marché dans cette rue juste en bas. En sortant de l’entretien, la personne m’avait dit : « C’est facile, vous passez sous cet immeuble et la gare, c’est toujours tout droit ! ».

Le soleil apparaît désormais tout entier entre ces deux bandes de nuages : beau cercle orangé, il m’éblouit. Quel spectacle ! C’est splendide ! Magnifique surprise, cadeau du matin. J’ai une envie de voler, de danser. J’imagine les tours d’Argentine et le château d’eau s’animant, dansant dans une chorégraphie bien réglée. Le ballet des bus sur le pont de Paris, celui des voitures sur le parking, quelques piétons qui partent vers le marché…
La ville s’anime en ce samedi matin.
J’imagine Kyle Eastwood et sa bande jouer un dernier morceau après le concert d’hier, sur le toit, juste à mes pieds.

Je veille et j’observe encore, comme on le fait en montagne, assis en haut d’un col après une ascension.
Et je songe au Perchoir, ce cher Perchoir, et à mes parents.
Cette dernière pensée sera pour eux.

Tous mes sens en éveil, ce soit au théâtre je veille.
Dans ma ville natale où chaque jour je m’émerveille.

Bon matin,
Différent, haut les cœurs.
Le soleil va-t-il se lever ?
Brume, brume, brume.

J’attends. Les voitures tournent, feux rouge et vert,
Les toits du centre-ville, les tours de l’extérieur et la végétation brumeuse.
Trois églises identifiées, puis une dernière apparaît tout au loin : c’est celle du quartier de Marissel.

Le jour s’est levé, toujours pas de soleil, brume rosacée.
Retour des enfants qui ont accompagné les grands à l’école ; il doit être 8h40.
Les voitures tournent sur le parking, les places sont déjà prises.

Un avion part, un autre arrive.
Puis la cloche de l’église sonne, trois flocons de neige… magique. Il doit être 9h.

Cette fin de veille est accompagnée par un pigeon curieux : un jeu s’installe.

Veilleur, voyageur, qu’ai-je fait dans cet enclos de verre ? Mystère…

Une heure. Une heure offerte. Arrachée à la frénésie du monde et à la pesanteur du quotidien. Une heure pour veiller, pour voir, pour vibrer, pour vivre. Pour vivre le lever de soleil dans les cieux embrasés.

D’abord, je vois les panaches de fumée, tout guillerets, au-dessus des toits. J’entends un chien qui aboie. Les voitures dansent sur le parking, ballet rythmé en quête du Graal de la place gratuite. La congrégation de fumeurs, gobelet de café chaud sur la table et cigarette à la main, s’y réchauffe de chaleur humaine et me fait un coucou, à moi, attentive dans ma cabane suspendue.
Une femme vêtue d’un manteau vert. Des bus bleus. Un petit chien avec son gilet orange. Et les oiseaux là-haut, dans le ciel. Et puis, encore et toujours, le ciel. Le soleil. Les couleurs qui muent, évoluent, se diluent.
Les lumières derrière moi se reflètent sur la vitre et dessinent un cadre pour ce tableau de la vie.
Sentiment de plénitude et de joie. Émerveillement. Elle est belle, notre planète. Et les oiseaux, là-haut, dans le ciel.
Des gens passent. Seuls, à deux, à plusieurs. La France qui travaille, celle qui aimerait travailler, celle qui va à l’école et découvre la vie avec le même enthousiasme que je découvre, aujourd’hui, ma ville.
Des enfants rient. Des amis dérivent. Des femmes pressent le pas. Des cyclistes volent vers leur destination. Des outils ronronnent. Là-haut, dans le ciel, joue un murmure : des oiseaux en route vers l’est. Et un avion, un seul, à contre-vol, vers l’ouest. Un rebelle. Comme toi, ma rebelle.

Une heure face au monde, face à moi-même, c’est un cadeau somptueux. Merci.

Et puis la rencontre. La rencontre avec la ville. Avec le monde qui s’éveille. Avec Agnès, qui m’accueille avec un sourire grand comme ça et des souvenirs éblouis de sa propre veille.

Je fixe le soleil. Il est rond, il est jaune, il irradie. Le soleil comme un cœur qui bat, comme un œil qui palpite. Et les oiseaux, là-haut, dans le ciel.

Il y a 66 ans, tu venais au monde, le monde venait à toi.
C’est pour toi, Anne-Marie, pour l’enfant que tu étais, pour tous les enfants du monde.

Que ça passe vite ! Je ne pensais pas pouvoir rester »immobile » si longtemps, et pourtant je n’ai pas ressenti le besoin de mouvement.

Prendre le temps d’observer, d’écouter de près, de loin… Regarder les gens qui passent, il n’y a pas foule en ce jour glacial !

Puis, mon regard va au loin, essayant d’identifier les bâtiments, les rues…
Et les éclairages artificiels s’allument et je distingue d’autres lieux… La grue de la future école Samuel Paty paraît si petite d’ici, alors qu’elle semble monstrueuse quand je la vois de mon école, au quotidien.

Je pourrais en écrire encore, mais je préfère garder ces images et ces moments dans ma tête.

C’est une expérience à vivre, je suis très contente de l’avoir vécue individuellement, mais j’ai hâte de pouvoir échanger avec les autres veilleurs.euses.

Merci.

Dans mon abri perché, aux senteurs boisées,
J’ai le bonheur de veiller.
Quelle merveilleuse idée !

Le ciel est gris, mais l’horizon est dégagé.
La pluie vient de s’inviter, c’est la valse des parapluies.

S’extasier, sourire, chantonner,
Il y a tant de choses à contempler.
Imaginer, s’émerveiller,
Je laisse mes pensées vagabonder.

Ce fut un instant « magique », trop vite passé.
Merci à vous de m’avoir fait vivre cette belle parenthèse enchantée.

Merci à Manon de m’avoir accompagnée.

Du haut de mon perchoir, j’observe le ciel beauvaisien bien nuageux en cette fin d’après-midi, le soleil s’y cache. Malgré tout, les parapluies ne sont pas de sortie : des piétons plus ou moins pressés, un ballet bien orchestré de voitures, sans oublier celui des oiseaux. Les tours du quartier Argentine me font des clins d’œil.

J’ai vraiment l’impression de veiller sur ma ville.

Soudain, un jeu de lumière m’interpelle, me faisant penser à un feu d’artifice de mon enfance tiré de la colline Saint-Jean vers la ville. C’est le bouquet final !

Belle expérience.

Merci à Manon pour son accueil, ainsi qu’à Xavier pour son accompagnement.

Beauvais, ma ville. Je reconnais bien. C’est normal puisque c’est ici que je suis née, que j’ai grandi, que j’ai travaillé, en un mot : que je vis.

Ce matin, j’ai pris du temps pour te revoir t’éveiller et te redécouvrir.

J’ai eu la chance d’avoir une météo exceptionnelle. Premières gelées, les toits blancs, puis le soleil venant illuminer la ville, de plus en plus fort. En bas, la circulation, les piétons, pressés pour aller travailler, dans leurs pensées… aveuglés, certainement, par l’habitude ! Regardez, c’est beau !

Avec cette expérience, j’ai pris conscience que moi aussi, je traverse la ville sans prêter attention, sans lever le nez. Alors promis, je vais reprendre le temps de tenir mes sens en éveil et te consacrer du temps pour flâner, juste pour flâner.

Puis, le soleil est passé derrière un banc de nuages, la luminosité a changé, un avion s’est posé, le voyage est terminé. Clap de fin sur ce beau spectacle.

Merci Joanne pour cette idée géniale.
Merci Manon pour votre accueil et votre accompagnement.
Merci à Saint-Joseph pour avoir aussi veillé face à moi.
Place aux suivants !

Expérience inédite et insolite que j’attendais avec curiosité. En une heure, le regard, élargi au début, se pose petit à petit sur des détails drôles (le bal des oiseaux autour du coq de Saint-Étienne), lumineux (l’énorme nuage rose, puis bleu, puis violet, et enfin gris), précis (les clochers de Saint-Joseph, Marissel, Voisinlieu).

La respiration se calme, s’apaise.

Merci pour cette respiration visuelle que j’ai vécue avec bonheur.

L’idée m’a tout de suite plu.
Le côté poétique, une nouvelle expérience et cette continuité sur une année, matin et soir.
L’envie s’est imposée de faire partie de cette chaîne humaine, le partage.
Et le jour J arrive enfin.
Hâte de découvrir la ville que je connais si bien.
Une vue générale d’abord, puis les détails surgissent de plus en plus.
L’animation, l’éveil de la ville.
Beaucoup de passage à pied, trottinette, bus et avion.
Et les toits tous différents.
Et la visite des pigeons donnant envie de voler avec eux.
Le temps passe vite.
Une belle expérience humaine.

Pour moi, c’était :

  • Une première veille.
  • Une première méditation.
  • Un premier coucher de soleil entier.

Une heure pour se reconnecter à soi.
Une heure pour ne pas penser.
Une heure pour regarder.

J’étais « dedans » : à écouter les bruits de mon corps, à réguler enfin ma respiration, à ressentir.
J’étais « dehors » : à admirer le ciel, les nuages, les oiseaux, les avions, les voitures, les passants.
Je n’étais pas sûre d’y arriver, mais j’ai réussi à ne pas penser.

De cette expérience ont surgi trois mantras :

  • On ne regarde jamais assez le ciel.
  • C’est dans la pénombre que la lumière arrive.
  • On se voit mieux, quand on prend du recul.

Merci pour ce cadeau.

Le temps qui passe, ralentit et puis s’arrête. Comme une métaphore de la vie. La jeunesse et ses impatiences, l’âge adulte, son ralentissement et sa stabilisation, et puis la vieillesse, où tout ralentit encore jusqu’à l’épure.

Rien ne se passe.
Seuls quelques cheveux gris déambulent, insomniaques. Les moineaux passent toujours par trois pour, probablement, visiter l’église. Un chien aboie, solitaire.
Seuls les bruits sont présents, surtout ceux de la ville : avions, voitures, la sirène des pompiers au loin.

Et puis, l’horloge et les cloches de l’église vous replacent dans le fil du temps.

Les pensées vont et viennent, enferment « l’incarcéré volontaire » dans une bulle hors du temps.

Et la porte s’est subitement ouverte…

Se lancer. Faire quelque chose de différent. Se confronter à ce que, d’ordinaire, on évite… l’inaction. C’est ce que je craignais avant.

Être dans cet abri, c’est une façon d’agir, d’être au monde. Pendant une heure, on ne cherche pas à rentabiliser son temps, mais simplement à l’éprouver, à le ressentir. Une pensée surgit, aussitôt remplacée par la vue d’un groupe de personnes. Où vont ces gens ? Quelle est leur vie ? Se dire que le ciel, qui était couleur pastel il y a peu, est devenu gris et brumeux… Entendre les cloches de l’église qui rythment le temps, ce qui, ce matin, a pris toute sa chair.

Hier, dans le spectacle, il était question de joie. Quelle joie de pouvoir vivre des expériences variées et quelle joie de prendre le temps d’observer ce qui nous entoure. J’essaierai de respirer plus souvent et de moins vouloir rendre le temps productif.

Un visage familier m’est apparu, passant sur le parking : j’ai aussi pris le temps de me dire à quel point j’aime cette personne.

Merci pour ce moment.

À mon arrivée dans cette cabine, j’appréhendais cette heure de solitude, peur que le temps me paraisse trop long. Et puis, rapidement, on se prend au jeu. On laisse notre esprit divaguer dans tous les sens et on se laisse aller à l’observation de cette ville qui s’anime à nos pieds. On contemple ce ciel gris d’automne avec ses multiples nuances, où l’on perçoit quelques touches de bleu sous cette couche. Dans le ciel s’animent des nuées d’oiseaux, que nous offre un ballet, un ballet qui rappelle l’enfance. On voit la nuit peu à peu remplacer le jour et les lumières urbaines prendre place.

À nos pieds, on observe le quotidien de nombreuses personnes qui s’agitent, le trafic des véhicules qui joue aux chaises musicales sur le parking.

Dans cette observation de la ville, on se laisse animer par la quiétude, la tranquillité ; on apprécie la solitude.
Finalement, cette heure passe si vite qu’il est déjà temps de quitter ce lieu suspendu.

Une belle expérience que nous offre le théâtre.

Il est déjà 17 h 24.