Une heure. Une heure offerte. Arrachée à la frénésie du monde et à la pesanteur du quotidien. Une heure pour veiller, pour voir, pour vibrer, pour vivre. Pour vivre le lever de soleil dans les cieux embrasés.
D’abord, je vois les panaches de fumée, tout guillerets, au-dessus des toits. J’entends un chien qui aboie. Les voitures dansent sur le parking, ballet rythmé en quête du Graal de la place gratuite. La congrégation de fumeurs, gobelet de café chaud sur la table et cigarette à la main, s’y réchauffe de chaleur humaine et me fait un coucou, à moi, attentive dans ma cabane suspendue.
Une femme vêtue d’un manteau vert. Des bus bleus. Un petit chien avec son gilet orange. Et les oiseaux là-haut, dans le ciel. Et puis, encore et toujours, le ciel. Le soleil. Les couleurs qui muent, évoluent, se diluent.
Les lumières derrière moi se reflètent sur la vitre et dessinent un cadre pour ce tableau de la vie.
Sentiment de plénitude et de joie. Émerveillement. Elle est belle, notre planète. Et les oiseaux, là-haut, dans le ciel.
Des gens passent. Seuls, à deux, à plusieurs. La France qui travaille, celle qui aimerait travailler, celle qui va à l’école et découvre la vie avec le même enthousiasme que je découvre, aujourd’hui, ma ville.
Des enfants rient. Des amis dérivent. Des femmes pressent le pas. Des cyclistes volent vers leur destination. Des outils ronronnent. Là-haut, dans le ciel, joue un murmure : des oiseaux en route vers l’est. Et un avion, un seul, à contre-vol, vers l’ouest. Un rebelle. Comme toi, ma rebelle.Une heure face au monde, face à moi-même, c’est un cadeau somptueux. Merci.
Et puis la rencontre. La rencontre avec la ville. Avec le monde qui s’éveille. Avec Agnès, qui m’accueille avec un sourire grand comme ça et des souvenirs éblouis de sa propre veille.
Je fixe le soleil. Il est rond, il est jaune, il irradie. Le soleil comme un cœur qui bat, comme un œil qui palpite. Et les oiseaux, là-haut, dans le ciel.
Il y a 66 ans, tu venais au monde, le monde venait à toi.
C’est pour toi, Anne-Marie, pour l’enfant que tu étais, pour tous les enfants du monde.


Lisa
jeu 20.11 8H08
Matin